Par Syna le 22.7.2020
Catégorie: Syndicat

«La cohésion de la société est très importante»

Ce qui motive Migmar Dhakyel, c'est donner une voix aux plus faibles dans la société. Et c'est ce qu'elle fait depuis le début de l'année, en tant que secrétaire centrale chez Syna.

Quelles sont tes tâches dans cette fonction?

Migmar Dhakyel: Mon travail consiste à représenter les intérêts des travailleurs et des travailleuses et à mobiliser les gens dans les branches. Dans les négociations des CCT, je défends leurs intérêts et cherche à obtenir des améliorations, ce qui n'est pas toujours facile. En fait, c'est ce qu'il y a de plus difficile: amener des améliorations à l'époque actuelle. On se retrouve souvent à la table des négociations avec des gens pour qui ça n'a aucun intérêt.

Qu'est-ce qui te motive?

Protéger les membres les plus faibles de la société, et défendre leurs intérêts, car ils en ont bien besoin. Si nous ne le faisons pas, le droit du plus fort s'applique dans la société – des gens tombent dans la misère sans que personne ne réagisse. J'éprouve le besoin de lutter pour la solidarité. Nous devons préserver la cohésion de la société et accorder la même importance à tous ses membres.
Pour moi, il est aussi important que les organisations politiques ne se contentent pas de dénoncer et de déplorer les abus, mais qu'elles agissent. Le fait que l'organisation pour laquelle je travaille soit active et prenne part à ce changement constitue une motivation supplémentaire. Et cela correspond à mon naturel: je ne supporte pas que les gens qui sont mécontents ne fassent rien pour changer les choses.

Tu as dit que ton travail était important. Est-il parfois aussi frustrant?

Le fait même de s'asseoir à la même table que les employeurs et d'amorcer un dialogue constitue un premier succès. C'est déjà beaucoup de pouvoir donner son avis aux employeurs et exposer les mécontentements et les dysfonctionnements. De nombreux travailleurs et travailleuses n'ont aucune possibilité d'exprimer leur désaccord et de se faire entendre. Donner une voix à ces travailleuses est ma grande motivation. J'utilise le féminin, car le secteur des services emploie majoritairement des femmes. C'est typique: là où les salaires sont les plus bas et les conditions de travail les plus mauvaises, on trouve en majorité des femmes.
Dans mon travail, je rencontre sans cesse des femmes qui ont le courage de changer les choses et qui veulent s'engager. C'est extrêmement motivant. Beaucoup de gens ont une image négative de l'humain et pensent que les jeunes femmes ne sont pas solidaires et ne luttent pas pour leurs droits. Pourtant, c'est exactement le contraire. Mais nous devons leur donner un espace où elles se sentent en sécurité et leur montrer qu'elles sont entendues. C'est ce qui me fait avancer: encourager d'autres personnes à amorcer ensemble un changement.

Quel a été ton meilleur moment en tant que secrétaire centrale?

Il y a quelques semaines, j'assistais à une séance de commission de l'artisanat. Un des représentants des employeurs quittait alors la commission. Pendant son discours, de nombreux membres de la commission avaient les larmes aux yeux. Il a déclaré qu'il venait lui-même d'une famille ouvrière et qu'après avoir achevé un apprentissage, il avait adhéré à un syndicat. Plus tard, il est devenu indépendant. Mais il n'a jamais oublié que l'essentiel, c'est l'humain, et qu'engager du personnel signifie aussi assumer une responsabilité sociale. De tels moments donnent de la force et des perspectives. Aujourd'hui, on cherche en vain de telles valeurs morales chez de nombreux employeurs, en particulier dans le secteur des services. L'humanité et les valeurs sociales y ont presque disparu. La plupart du temps, il s'agit plutôt d'une exploitation à outrance. Nous devons rendre à l'humain une place centrale.

As-tu aussi vécu des situations particulièrement comiques ou grotesques?

Lors des négociations d'une CCT, alors que nous discutions des suppléments de salaire pour le travail du dimanche, le chef de la délégation des employeurs a déclaré que le travail du dimanche était en fait une bonne chose. Il prétendait que nous, les syndicats, qui nous engageons avec tant d'ardeur pour la compatibilité entre la famille et le travail, devrions admettre que le travail du dimanche conviendrait particulièrement bien aux mères, qui auraient ainsi un jour de congé dans la semaine et pourraient s'occuper elles-mêmes de leurs enfants. Je dois avouer que cela m'a laissé un instant sans voix.

«C'est ce qui me fait avancer: encourager d'autres personnes à amorcer ensemble un changement.»

Migmar Dhakyel

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