Par Syna le 3.3.2022
Catégorie: Branches

«Personne ne veut provoquer un vide conventionnel»

Les négociations pour une nouvelle convention nationale (CN) dans le secteur principal de la construction ont commencé. Johann Tscherrig, secrétaire central chez Syna, évoque dans une interview l'état des négociations, les difficultés rencontrées et les prochaines étapes.

Johann, il faut agir dans le secteur principal de la construction. Pourquoi?

Johann Tscherrig: La CN actuelle court jusqu'à fin 2022. Il est grand temps de la renégocier et de l'améliorer. Si aucun accord n'est trouvé avec le patronat, nous allons au-devant d'un vide conventionnel.

Est-ce déjà arrivé?

Oui, plusieurs fois. Mais généralement pour 2 ou 3 mois seulement. 6 mois sans convention, c'est la plus longue période dont je me souvienne.

À quel point est-ce grave?

Sur le principe, pour le personnel du bâtiment, un vide conventionnel est inacceptable. Cette situation peut être tenable pendant une courte période, durant laquelle les dispositions de l'ancienne CN restent applicables. Sinon, l'employeur devrait d'abord les adapter par un congé-modification. Mais c'est difficilement réalisable à si court terme.

Et si l'état de vide conventionnel se prolonge?

Cela peut devenir très compliqué. Le patronat adaptera les conditions de travail à la baisse, conformément aux dispositions du Code des obligations (CO). Soudain, en application du CO, on n'accordera plus que 4 semaines de vacances, alors que la branche en prévoit 5. Les horaires de travail hebdomadaires vont également se dégrader, ou le 13e salaire sera supprimé.

L'automne dernier, plus de 17 500 ouvriers et ouvrières du bâtiment ont adopté leurs revendications pour la nouvelle CN. Quel est leur état d'esprit?

Tendu! Beaucoup se sentent abandonnés. Depuis 2 ans, leur salaire n'a pas été augmenté, contrairement à d'autres branches de l'artisanat. Parallèlement, les conditions d'hygiène sur les chantiers sont souvent catastrophiques. Il est urgent d'agir sur ce point.

Les employeurs le reconnaissent-ils?

En théorie, oui. Ils disent vouloir négocier une nouvelle CN. Mais à quel prix? S'agissant de la flexibilité, des heures supplémentaires et de la durée du travail, les points de vue et les exigences divergent. Les changements ne doivent pas se faire uniquement au détriment des travailleurs; le personnel, qui travaille dur, ne l'accepterait d'ailleurs pas.

Comment as-tu vécu les négociations avec la Société suisse des entrepreneurs, qui ont débuté le 28 février?

Bien que leurs représentants aient eu l'air un peu distants, un vent de changement et une volonté de négocier étaient perceptibles. Les employeurs ont pris connaissance de nos revendications, sans toutefois y répondre ou présenter des revendications de leur côté. 

À quel point es-tu optimiste?
Je pense que personne ne voudra provoquer un vide conventionnel. Ce n'est dans l'intérêt d'aucune des parties. Et tout le monde est conscient que la branche a un problème et qu'il faut augmenter son attractivité, car la main-d'œuvre manque, ou quitte le métier. Les négociations seront toutefois difficiles.
Que va-t-il se passer maintenant?

Au total, 7 cycles de négociations sont prévus. D'ici l'été, il faudra dresser un état des lieux. Les revendications doivent être concrétisées à l'automne, pour pouvoir espérer qu'une nouvelle CN soit prête en novembre. J'espère vraiment que cela fonctionnera, car la pression et le stress sur les chantiers sont énormes. Avec des conséquences négatives pour la santé, le bien le plus précieux de l'être humain. Ce n'est pas acceptable.

Dans la rue pour la CN

Le samedi 25 juin 2022, le personnel de la construction de toute la Suisse se rassemblera à Zurich lors d'une grande manifestation pour soutenir clairement la CN. Sois de la partie!

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